Suspension des allocations familiales pour absentéisme scolaire
Le Monde.fr 16 septembre 2010
Le Parlement a adopté définitivement, mercredi soir, une proposition du député UMP Eric Ciotti prévoyant la suspension des allocations familiales pour absentéisme scolaire, sur demande d'un inspecteur d'académie. Le Sénat a voté sans le modifier le texte déjà adopté le 29 juin par les députés, ce qui rend l'adoption définitive. Seule la majorité l'a approuvé, la gauche votant contre. Ce texte répond à un vœu répété à de nombreuses reprises par Nicolas Sarkozy, qui a qualifié de "priorité absolue" la lutte contre ce "cancer".
Pour certaines familles, l'aide et le dialogue ne suffisent pas. Certaines familles refusent d'assumer leur autorité sur leur enfant, laissent libre cours à son absentéisme", a plaidé le ministre de l'éducation, Luc Chatel, pour qui la suspension des allocations est "un ultime recours".
L'opposition a combattu ce texte, également dénoncé par les principaux syndicats d'enseignants et la première fédération de parents d'élèves, la FCPE. Il s'agit d'une "mesure simpliste, inefficace, populiste et agressive", "d'une nouvelle forme de double peine pour les plus pauvres ; c'est indécent", s'est indignée Marie-Christine Blandin, des Verts. Pour Marie-Agnès Labarde (CRC-SPG, communistes et Parti de gauche) l'absentéisme "reste un phénomène marginal" qui, "contrairement à ce qu'on nous indique, est relativement stable". "On est passé de 6 à 7 %, ce n'est pas une explosion", a-t-elle soutenu. Yannick Bodin (PS) a dénoncé "une visée répressive insupportable" du gouvernement, qui "s'inscrit dans le contexte malsain de ces derniers mois", où il s'est "réapproprié des discours autoritaristes et démagogiques proches de l'extrême droite".
La majorité sénatoriale a voté le texte sans enthousiasme. Déjà à l'Assemblée, le projet n'avait pas fait le plein des voix de la droite, des élus de premier plan n'ayant pas pris part au vote ou s'étant abstenus, comme les UMP Christian Jacob ou Pierre Méhaignerie. Une bonne partie des centristes se sont abstenus et les élus du MoDem ont voté contre.
La proposition du député niçois prévoit une réponse graduée. Lorsque le chef d'établissement constate l'absentéisme de l'élève – au moins quatre demi-journées d'absence non justifiées en un mois –, il le signale à l'inspecteur d'académie. Ce dernier adresse alors un avertissement à la famille et "l'oriente vers des dispositifs d'aide". Parallèlement, il saisit le président du conseil général afin que soit mis en place un contrat de "responsabilité parentale".
Si, au cours du mois suivant, l'absentéisme de l'élève est à nouveau constaté, l'inspecteur d'académie a alors "l'obligation" de saisir le directeur de la Caisse d'allocations familiales, qui suspendra le versement des allocations.
Si l'enfant retrouve le chemin de l'école et que son "assiduité" est constatée sur une durée d'au moins un mois, le versement des allocations pourra alors être rétabli. La possibilité de suspendre les allocations familiales est déjà inscrite dans la loi du 31 mars 2006 relative à l'égalité des chances, mais, jusqu'à présent, la décision était du seul ressort des présidents de conseils généraux.